Des jeunes
s’affairent à la lecture sur le « trottoir du savoir » à Brazzaville.
Credit photo : ©BaudoinMouanda
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Je me suis fait poser la fâcheuse plus d'une fois au cours des dernières
semaines : ''mais Guy-Serge, tu as cassé ta plume ? Tu n'écris plus sur ton blogue''.
Ils ont bien raisons de me relancer, et j'aurais bien tort de trouver des
excuses.
Je serais prétentieux de dire que je n'ai pas le temps d'écrire. Qui a du
temps dans notre nouveau monde 2.0 ? Beaucoup maîtrisent leur montre, mais
personne ne dompte vraiment son temps. Le temps, on le saisit, le créé, au
pire, le bouscule, mais on ne le possède pas.
Bien sûr qu'écrire requiert du temps, mais pas n'importe lequel, celui des
habitants du pays de Cocagne. Celui-ci qui est élastique, celui- là qui
ressemble à un temps mort pour reprendre son souffle, un arrêt sur écran pour
commenter.
Quand on sait que le physicien Albert Einstein, monument de la sphère du
savoir, dormait jusqu’à 12 heures par jour, nous sommes en droit de nous poser
la question suivante : l'oisiveté est-elle nécessaire au travail
intellectuel ?
L'homme de réflexion serait-il condamné à être un Oblomov des temps modernes
?
Bien que sombrer dans l'Oblomovisme serait une alternative outrancière, le
penseur doit ralentir là où tout le monde accélère, ce n'est qu'ainsi qu'il
remarque les détails qui échappent aux yeux de ses contemporains, trop affairés
qu'ils sont, à danser sur le rythme de cette chanson dont le titre est ; le
temps c'est de l'argent.
L'auteur rigoureux doit réfléchir, oui, mais aussi, anticipé les contre-réflexions
de ses lecteurs, et y répondre d'avance. De cette manière, s'il reçoit des
contre-arguments une fois son texte publié, ils ne seront que bénéfiques pour
lui, car ils lui apporteront une nouvelle façon de voir les choses qui lui
était totalement inconnu.
Notre espace temporel, bête noire de nos savants, nous a toujours compliqué
la vie. Sa relativité crée des inégalités. En effet, même si nous avons tous 24
heures dans une journée, elles diffèrent d’un individu à l’autre. Untel
trouvera 24h toujours trop courtes, l’autre juste assez, et même que certains les
trouvent trop longues...
Cela est donc lié à notre activité, le temps prend la forme de la tâche qui
l’occupe, et non l’inverse, comme voudrait nous le faire croire les dérives du libéralisme
économique. Il est ainsi une question de qualité, et non de quantité. Du temps
oui, mais pas n’importe lequel. Toute exercice à son type de temps. Le temps de
couper du bois d’un bûcheron n’est pas le temps de rédiger d’un écrivain. Le temps
de plaidoyer d’un avocat, ne sera jamais le temps d’éduquer d’un parent. Et ainsi
de suite, le temps nous impose ses caprices.
Certains peuples, dont ceux du Sud du Sahara, ont remarqués cela depuis des
lustres. Voilà pourquoi ils n’ont jamais eu un regard linéaire du temps. Sous le
soleil africain, le temps a toujours été une grosse roue qui ne cesse de
tourner en répétant les mêmes événements.
On ne réinvente pas la roue, dit-on. Je me suis donc soumis aux étrangetés
de celle-ci pour composer cette rédaction.
J’espère que vous aurez...le temps de lire.
Guy-Serge Luboya
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