Chad « Pimp C » Butler en spectacle. |
Né Chad Butler en 1973 dans le sud des
États-Unis, le monde, surtout celui du hip-hop, l’a plutôt connu sous son nom
de scène : « Pimp C ».
Rappeur talentueux, pas nécessairement le plus
poétique, mais assurément un des plus sincères, Pimp C a fait danser bien des
gens par ses rimes profondes, sa voix chantante et son accent « country » qui
trahissait ses origines sudistes.
Comme plusieurs rappeurs des US, il était issu
d’un milieu modeste et comptait un passé tumultueux rempli d’activités illicites.
En fait, Pimp C appartient à cette longue lignée de jeunes de quartiers désœuvrés
en proie à la criminalité, qui ont eu pour salut la musique rap comme agent de réintégration
sociale.
À la fin des 80, avec son acolyte de toujours, le
chanteur « Bun B », le duo forme le groupe UGK
qui deviendra une référence dans le milieu hip-hop et une inspiration pour les
rappeurs venants du Sud.
À ses débuts, les mélodies de Pimp C sont composées
d’expériences de trafic de drogues, proxénétisme et de toutes ces choses qui
font courir un loubard : argent, femmes et pouvoir.
En somme, mis à part son charisme indéniable qui
le démarque de la masse, Pimp Chad,
est un rappeur comme les autres. Rappeur typique jusqu’à un certain jour de
janvier 2002 où un fâcheux incident l’envoie derrière les barreaux…
La
prison et le réveil spirituel
À quelque chose malheur est bon, dit-on. Comme Malcolm
X avant lui, l’élévation de l’esprit de Chad Butler se fera dans l’adversité entre
les murs d’un pénitencier. En janvier 2002, il est arrêté pour non-respect des
conditions de probation et possession d’arme après une altercation dans un
centre commercial. Il écope d’une
sentence de huit ans, et en fera finalement quasiment quatre.
Pour rester loin des nombreux problèmes de la vie
de prisonnier, il travaille à la bibliothèque de l’établissement, et y passe le
clair de son temps.
À sa libération en décembre 2005, c’est un homme
nouveau qui revoit le soleil. Pimp C semble avoir compris des principes durant
son isolement et est animé d’une volonté de puissance, mais ne sait par où
commencer.
Peu de temps après avoir repris sa liberté, il réalise
la chanson « Living this life », où il manifeste son désir de changement. Toujours
dans le même titre, il évoque avoir lu « l’équivalent de quatre bibliothèques »,
et en profite pour ridiculiser ce mythe raciste qui voudrait que lorsque l’on
veut cacher quelque chose à un noir il faille le mettre dans un bouquin.
Le chanteur va jusqu’à citer certains des livres qui
l’on marqués dont : Behold a pale horse,
The 48 laws of power et Secrets societies of America.
Il entreprend aussi, petit à petit, de délaisser
son surnom « Pimp » pour un autre moins péjoratif.
Pimp
C attaque ses pairs
Chad Butler se fait de plus en plus critique de
ses propres frères de micro. Il reproche à beaucoup de rappeurs de ne pas être éveillés
et de tomber dans le jeu des maisons de disques. En effet, pour fins de
concurrence, jalousie ou autre, beaucoup de rappeurs se détestent et
maintiennent d’intenses rivalités qui frôlent la menace de l’intégrité
physique.
Pour Butler, ce sont les grandes sociétés gérantes
de ces rappeurs qui alimentent et maintiennent ce climat afin d’éviter la
collaboration des artistes et l’autogestion de leurs carrières.
Dans un effort d’autodétermination, il réussit à réconcilier
plusieurs rappeurs et tente de les convaincre de l’importance de l’unité pour devenir
maître de leurs destins.
Mais, Butler ne s’arrête pas là, il tire à boulets
rouges sur l’élite du hip-hop.
Le 24 juillet 2007, en entrevue dans une radio d’Atlanta,
la 107.9, les auditeurs ont droit à un Chad Butler surexcité. L’homme, visiblement énervé, accuse de grands
noms du hip-hop d’êtres menteurs et hypocrites. En plus d’écorcher quelques
personnalités du milieu comme le producteur Russel Simmons et les artistes
Young Jeezy et Ne-Yo, il affirme détenir des informations accablantes sur certains
grands dirigeants du domaine, mais refuse de les divulguer par respect pour la
vie privée de ces derniers.
Son
corps retrouvé inerte dans une chambre d’hôtel..
Le 4 décembre 2007, le corps de Chad « Pimp C »
Butler est retrouvé inerte dans une chambre d’hôtel de Los Angeles où l’artiste
était de passage dans le cadre d’une tournée. Sa mort est confirmée et l’autopsie
officielle révèle qu’un mélange de codéine et un trouble de l’apnée du sommeil ont
eu raison de l’enfant terrible du hip-hop. Il était mari, père de famille et à
peine âgé de 33 ans.
En
conclusion
Il y a quelques années, le célèbre trompettiste
Quincy Jones écrivait ceci en rendant hommage au rappeur Tupac Shakur décédé
à 25 ans, « Si nous avions perdu Oprah à 25 ans, nous aurions perdu une
personne de relativement inconnu, une présentatrice locale. Si nous aurions
perdu Malcolm X à 25 ans, nous aurions perdu un lascar du surnom de « Detroit
Red », si j’avais quitté le monde à 25 ans, nous aurions perdu un joueur de
trompète et aspirant compositeur ».
Ceci résume merveilleusement bien ce que le monde
a perdu en 2007 avec la disparition de Chad Butler, fauché pendant sa
métamorphose révolutionnaire.
Les rappeurs constituent la carte cachée du militantisme
aux États-Unis. Ils peuvent sortir de nulle part, s’inviter à une table où ils
ne sont pas attendus et secouer sérieusement l’ordre établi. Leur pouvoir de propagande,
leur franc-parler déconcertant, leur proximité avec le peuple et le puissant
effet de la musique sur le cerveau humain, en font de potentiels imposants
acteurs de changements.
Il reviendra aux nouvelles grosses pointures du
hip-hop de continuer l’œuvre de Chad « Pimp C » Butler..
Mayamba Luboya
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