dimanche 27 mars 2022

Fimbu : pourquoi les Léopards doivent absolument changer de slogan

Nous sommes à l’heure des qualifications pour le mondial de football 2022. Pour l’équipe les Léopards de la RDC, la passion des supporteurs est à son comble. Entre cris de ralliement, chants de stades et hymnes fétichistes, un mot revient souvent : fimbu.

Fimbu, qui signifie chicotte en lingala, est devenue l’expression omniprésente sur le terrain et dans les estrades à Kinshasa. Le terme a d’abord été popularisé par le chanteur Félix Wazekwa dans un titre homonyme qui sert de musique officielle pour le onze congolais. La chanson fimbu est aussi accompagnée d’une danse qui est une mimique d’un coup de fouet. C’est ce geste que font les joueurs congolais pour célébrer un but ou une victoire. L’idée derrière le concept est d’avertir l’adversaire que les léopards fouettent leurs rivaux et que tous ceux qui se dresseront sur leur route seront chicotés.

Tout cela serait beau si le "fimbu" n’était pas associé à une des périodes les plus sombres de l’histoire du Congo. En effet, si la chicotte est dans l’esprit des Congolais aujourd’hui, c'est parce qu'il n’y a pas si longtemps leurs grands-parents l’ont vécu dans leurs chairs.

Tout commence en 1890, cette année-là en Irlande, John Dunloop, à travers sa compagnie qui porte son patronyme, se lance dans la fabrication de pneus en caoutchouc. Cette idée va révolutionner l’industrie du vélo et celle de l’automobile. Des sociétés comme Goodyear, Michelin et autres sont dans la conception de pneumatique. Il y a alors une course mondiale au caoutchouc, et le Congo en regorge. À cette époque l’espace congolais est la "propriété privée" de Léopold II, Roi des Belges. Léopold II plonge tête première dans cette ruée vers le caoutchouc et il est extrêmement pressé, car il voit arriver la compétition du caoutchouc d’Amérique latine et de l’Asie. Le Roi des Belges ordonne ainsi à ses agents au Congo d’obliger les captifs congolais à accélérer la cadence de travail par tous les moyens nécessaires.

La chicotte devient l’ordre sur le chantier. Les hommes qui ne ramènent pas assez de caoutchouc sont chicotés et on va même jusqu’à kidnapper leurs femmes comme moyen de pression. Les plus récalcitrants sont simplement assassinés et coupés la main comme preuve et trophée.

C’est par ce régime de "fimbu" que le caoutchouc devient la principale source de revenu de Léopold II et que des entreprises, aujourd’hui multinationales, prennent leur envol. 

Ainsi, contrairement à la croyance populaire les châtiments corporels dans l’éducation des enfants ne font pas partie des traditions congolaises.

Par traumatisme, la famille congolaise est devenue le prolongement du système colonial. La majorité des caractéristiques du colonialisme y sont recopiées : le père remplace le colon (froid, distant et méchant), le privilège des membres plus claires de peaux, et la fameuse chicotte dans toutes les maisons comme elle était dans tous les bureaux des administrateurs coloniaux. 

La nouvelle génération de Congolais doit combattre le syndrome de Stockholm et comprendre que la chicotte est un produit importé. Chanter et danser "fimbu" est une honte nationale et une insulte à nos ancêtres.

C’est comme si aujourd’hui, des juifs feraient d’un instrument de torture durant l’holocauste, le principal slogan de leur équipe nationale de football. 

 

 

 

Mayamba Wa Luboya

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