lundi 4 mars 2019

Le Congo change


En décembre 1965, dans son recueil de textes intitulé « Telema Congo », l'entrepreneur en série Augustin Dokolo écrivait ceci : « …si préside aux destinées du pays un homme dont le pouvoir repose sur des forces vives de la Nation, sur un corps ayant prouvé pendant ces tristes années de trouble et de rébellion qu’il était bien au service de tous, quel parlementaire déçu, quel intellectuel aigri, quel homme d’affaires dupé, quel citoyen découragé ne trouverait un courage nouveau pour combattre, pour créer, pour construire ? ».


Telle une bouteille à la mer, le message d’Augustin Dokolo refait surface à l’heure des réflexions postélectorales du scrutin du 30 décembre 2018 en RDC. Des propos qui, 54 ans plus tard, sont d’une justesse qui frôle la vision. Entre une démocratie à ses balbutiements, des institutions faibles et un débat sur la « vérité des urnes », n’avons-nous peut-être pas, entièrement, eu le temps d’apprécier le moment présent : le Congo change.

Des salariés impayés entamons des grèves à la queue leu leu, des étudiants d’universités manifestant ouvertement leur opposition au Président de la République, des meetings hostiles au pouvoir diffusé en direct à la télévision d’état, le Congolais n’avait pas respiré cet air de liberté d’expression depuis des lustres. Les téméraires qui s’aventuraient sur ce genre de terrain miné le faisaient au péril de leurs vies.

Et pourtant le nouveau président Félix Tshisekedi, en poste depuis une trentaine de jours seulement, n’a même pas encore nommé de gouvernement. Toutefois, il a réussi quelque chose de très simple, là où son prédécesseur a lamentablement échoué 18 ans durant, le nouveau président…parle. Il parle aux Congolais de l’étranger quand il se déplace, il parle aux médias, il parle au Congolais de la rue. C’est cette communication qui donne l’espoir, et c’est cet espoir qui fait vivre.

Les pays ne tombent pas à cause de la corruption, d’une armée faible ou des multinationales aux dents longues. Les pays tombent par faute de manque de volonté politique.  

Ce n’est pas un hasard que le leader le plus remarquable de l’Afrique actuellement, le premier ministre éthiopien Abiy Ahmed, a étudié le « leadership transformationnel ». Dr Ahmed a saisi toute la science de l’exemplarité. 

Tout ce qui manquait à ce Congo, ce n’était donc que la parole. La parole sincère d’un chef.  Au commencement était le Verbe, dit-on. Ce sacré verbe, il a été l’arme redoutable des géants de notre histoire. De Lumumba à Malcolm X en passant par Marcus Garvey, ces « grandes gueules » n’avaient ni armée, ni fortune personnelle, ils n’avaient pour dynamite que la puissance des mots, prêts à détonner au moindre affront. Ces aînés parlaient avec l’esprit, en oubliant que dans la foulée, c’est le corps qui payerait la dette de ces audaces verbales. 

Le vent du changement congolais souffle et la diaspora n’est pas épargnée par cette brise.  Dans les salons de coiffure et autres lieux de rencontres de la communauté, ça parle de retourner au pays, le grand retour cette fois. Le bruit court que les « combattants » n’ont plus à craindre d’être appréhendés à l’aéroport de Kinshasa par des services secrets soupe au lait, béquille d’un pouvoir boitant.


Le Congo change, est-ce que le Congolais changera ?


Mayamba Luboya



Kalala, un nom qui lui allait si bien